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Your Name, Makoto Shinkai nouvel incontournable de l'animation japonaise!

     Ohayo, bonjour!

Et bonne année 2017! Le nouvel an vient de passer, Noël aussi, et c'est maintenant la rentrée qui approche... Mais restons heureux car, en plus de tous les cadeaux probablement géniaux que vous avez reçus, les japonais nous ont réservés une surprise magnifique qui est apparue dans nos cinémas le 28 décembre 2016!

     Qui va donc succéder au Studio Ghibli ?

allocine.fr

Depuis la mise en retraite d'Hayao Miyazaki (qui n'est plus d'actualité, je vous renvoie à mon article sur le sujet) et l'annonce de la volonté du studio Ghibli de faire une pause, tout le monde s'est lancé à la recherche d'un successeur au grand studio et à son réalisateur phare. Du coup une place est laissée à de nouveaux auteurs pour percer sur nos écrans et plusieurs noms sortent du lot. Mamoru Hosoda est peut-être le plus important d'entre eux. En 2012 Les Enfants loups, Ame et Yuki avait été grandement apprécié par le public français, puis en 2015 Le Garçon et la Bête arrivait et posait comme une évidence le talent incontestable du réalisateur. Cependant, Hosoda se heurte aujourd'hui à un sérieux concurrent.

     Your Name

C'est le premier film de Makoto Shinkai à être distribué en France. Privilège que peu de films d'animation japonais obtiennent, la plupart n'arrivant jamais jusqu'à nous, ou alors seulement en DVD. Mais celui-ci méritait amplement cette distribution : on sait en effet qu'il est allé chatouiller les records des plus grands succès du studio Ghibli au box-office japonais! Du coup le film promet monts et merveilles et, comme j'ai souvent eu l'occasion de le constater, trop d'enthousiasme, c'est parfois trompeur. Je partais donc sceptique en allant voir le film.

Et à première vue, le film n'a rien qui le place au-dessus des autres. L'idée de base est originale : deux personnages, une fille de la campagne et un garçon de Tokyo, qui échangent leurs vies pendant leurs rêves, mais c'est l'histoire d'amour naissante entre les deux qui semble vite être mise en avant, on s'attend alors à voir un film romantique comme on a pu en voir des dizaines... Mais c'est sans compter sur le savoir-faire du réalisateur.

Toutes les captures d'écran sont tirées de la bande-annonce du film.

     Un film romantique

Parce que oui, ça en est clairement un, mais un particulièrement bon. Avec ce film, Makoto Shinkai témoigne une fois de plus de l'incroyable habileté des japonais à saisir à la perfection, en quelques mots et deux trois traits de crayon seulement, des émotions et des sentiments. (On se rappelle que cette habileté vient probablement de l'influence du Zen qui insiste sur la capacité à apprécier l'instant!) Loin d'être barbante, cette histoire d'amour, assez originale du fait de la situation particulière des personnages, est absolument bouleversante d'un bout à l'autre. On s'attache vite aux personnages, et le jeu d'identifications qui se joue entre eux fait aussi effet sur nous, de telle sorte que la distance critique que je voulais maintenir par rapport au film n'a pas tenue plus de dix minutes, tellement j'ai été emporté par le récit.

En plus de ça, le film profite de cette situation particulière pour aborder des questions en rapport à la sexualité qui sont encore relativement tabous chez nous, comme celles sur la transsexualité ou l'homosexualité par exemple. Ou encore d'autres directement liées au contexte du Japon contemporain, notamment celle fondamentale du tiraillement entre traditions millénaires et modernité : à l'image de la jeune fille, Mitsuha, qui rêve de quitter son ''bled'' pour partir à Tokyo.

     Le Temps au cœur du récit

Dès le début, le film nous montre que le temps sera un élément majeur de l'histoire. On cesse vite de compter les diverses time lapses (plans passés en accéléré où le temps semble s'écouler beaucoup plus rapidement que d'habitude) sur le torii (portail sacré d'un sanctuaire shinto) du village de Mitsuho ou sur les immeubles de Tokyo. Mais le plus important n'est pas là!

Tokyo à gauche et le torii du village de Mitsuha à droite.

Sans aller trop loin dans ce sujet-là, par peur de vous spoiler l'intrigue, sachez que, comme Mamoru Hosoda dans La Traversée du Temps (2006), Makoto Shinkai s'aventure ici dans les chemins dangereux des voyages dans le temps, gare aux incohérences! Là aussi l'auteur s'en sort avec brio et, tout en rajoutant à son récit une dimension supplémentaire, il évite heureusement de s'embourber dans des complexités narratives inutiles. Ce qui est intéressant dans la manière dont Shinkai s'intéresse ici au temps, c'est qu'il le fait en s'appuyant sur l'idée que le Japon en a : à savoir celle d'un temps circulaire. Comme la vie par la réincarnation, le temps est, pour les japonais, un cycle, une boucle qui n'a de cesse de tourner sur elle-même. De telle sorte que deux temporalités peuvent coexister dans le même instant. C'est l'idée qu'on a par exemple dans le récent film de Hiromasa Yonebayashi, Souvenirs de Marnie (2015), avec ce manoir au bord des marais qui apparaît : tantôt luxueux (comme il l'était quelques dizaines auparavant) quand le fantôme de Marnie (qui y vivait alors) s'y manifeste, tantôt en ruines ou en reconstruction comme il l'est ''véritablement'' dans le temps du récit. Les deux temporalités cohabitent alors dans la même réalité. Ici, ce temps circulaire est symbolisé par les tresses de tissus que tisse Mitsuha et qui se nouent ou se dénouent sans arrêt, et que le film nomme régulièrement les ''fils du temps''.

     Courez vite au cinéma!

Au final c'est une histoire d'amour bouleversante et imbibée de culture japonaise que nous propose ce film. Alors on se laisse vite entraîner par la musique J-Pop et le montage rapide qui contribuent au charme de l'animation japonaise et on se laisse prendre au cœur par le récit.

Une comète au centre du film.
myanimelist.cdn - Makoto Shinkai

Ca transparaît surement de manière évidente dans mon article mais j'ai adoré ce film. Après le sublime Garçon et la Bête d'Hosoda je n'osais pas espérer mieux pour ce nouveau film d'animation. Et pourtant, Shinkai a peut-être su relever la barre encore plus haut. On parle maintenant souvent de lui comme du successeur de Miyazaki, mais ces affirmations sont souvent arbitraires et sujettes à changement. Ce qui est sûr cependant, c'est qu'il se place au même rang que lui, avec Hosoda et d'autres nouvelles têtes, en figure phare de l'animation japonaise.

C'est sans honte que j'admets que je ne connaissais pas ce réalisateur avant d'aller voir le film et que, en sortant de la séance, je n'ai pas su m'empêcher de courir me procurer quelques-uns de ses autres films, histoire d'en découvrir plus sur son univers. Le film vient tout juste de sortir en salles et restera probablement à l'affiche pendant encore un moment, alors dépêchez-vous d'aller le voir!

Sur ce j'espère vous avoir donné l'envie de découvrir ce film et je vous dis à la semaine prochaine pour un nouvel article Japon!

Simon MORGAN


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